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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 15.1.djvu/225

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THÉOLOGIE. RENOUVEAU DU XIXe SIÈCLE

de cette foi. tout ce que l’esprit reroil de l’objet et dont il fait sa vie d’esprit, était, chez Hermès, une chose de la raison. Il n’a pas vu qu’entre la raison d’une part préparant l’accès à la foi par la démonstration des prœambula fidei et celle de la crédibilité générale du dogme et, d’autre part, la raison retrouvant une activité dans la foi et sur les objets de la foi par la théologie, s’intercalait un acte surnaturel dans lequel l’esprit était élevé à un nouvel ordre d’objets.

Hermès montre ainsi le danger d’une apologétique conçue comme une démonstration du dogme telle qu’une théologie pourrait lui faire suite sans rupture de continuité. Dès que, dans les diverses analysis fldei, on cherchait pour l’acte de foi lui-même, et non seulement pour ses préparations rationnelles, une résolution en une évidence donnée dans la conscience, n’était-on pas porté dans le sens d’une foi philosophique et d’une Vernunftllwologie ?

Le philosophisme agit sur la théologie assez différemment en France et en Allemagne. En France, la philosophie était étroitement laïque ; elle excluait le christianisme. En Allemagne, Fichtc, Schelling et Hegel assumaient dans leur système une sorte de double idéologique du christianisme, d’allure beaucoup plus religieuse. Aussi voyons-nous des théologiens faire de la théologie une explication hégélienne ou schellingienne des grands dogmes du christianisme. Dans cette théologie, tout le côté idéologique et spéculatif, la nécessité interne et l’enchaînement des mystères, semblent ne relever que du système philosophique, qui apporte la connaissance de 1’ « Absolu » ; le positiT du christianisme semble n’apporter qu’un élément de fait qui ne comporte, comme tel, aucune intelligibilité originale. Les écrits d’A. Gengler. Ueber das Verhùltnis der Théologie zur Philosophie, Landshut, 1826, et Die Idéale der Wisscnscha/t oder Encyklnpàdie der Théologie. Bamberg, 1834, malgré leur réelle valeur, reflètent quelque chose de cette tendance ; cf. J. Dicbolf, La théologie morale catholique…, p. 288 sq.

J.-B. Sagmiiller, Wissenscha/t und Glnube in der kirchlichen Aufkldrung, lïssea, 11)10 ; A. Keatz, Hejormversuche in der kaiholischen Dogmntik Deiitsclilands zu Béguin des 19. Jahrhunderts, Mayence, 1917 ; Cl. Selierer, Geschichte und Kiretiengeschichte an den deatschen Uniuersitàten im Zeitaller des llumanismtis, Fribourg-en-B., 1927 ; sur Hermès, voir K. Esciiweilyr, Die zwei Wege der neueren Théologie. .., Augsbouig, 1926, p. 81 sq.

III. LE RENOUVEAU DE LA THÉOLOGIE AU XIXe SIÈCLE ET DANS LA PÉRIODE CONTEMPORAINE.

Cette dernière partie de notre exposé historique se distribue d’elle-même ainsi : 1. le renouveau d’inspiration romantique ; 2. le renouveau de la srolastique ; 3. le développement des études positives et critiques ; 4. la crise des études ecclésiastiques et le modernisme ; 5. les synthèses ; 6. les tendances et les besoins d’aujourd’hui.

Le renouveau d’inspiration romantique.

En théologie le courant romantique est le premier à reconstruire, au cours des années 1810-1840. Son action s’exerce dans le sens de l’unité et de la réintégration d’éléments dissociés au cours de la période précédente. Il retrouve d’abord le sens du passé, des Pères et même, par le Moyen Age, de la scolaslique ; ainsi, il commence à retrouver le sens de la contemplation des vérités de la foi et de la spéculation sur elles : toutes choses qui sont très nettes dans l’école catholique de Tubingue et en particulier chez J.-A. Monter († 1838). Par le fait môme, le romantisme retrouve, ou découvre le sens du développement et de l’histoire.

Il apporte aussi le sens des connexions et le point de vue de l’organisme vivant. J.-S. Drey souligne la connexion interne des disciplines théologiques dans sa Kurze Einleitung in das Stutlium der Théologie, Tubingue, 1819. Grâce à ce sens vital et organique, des dissociations déjà accréditées sont dénoncées. Il est extrêmement frappant de voir l’élimination du rationalisme entraîner, comme une requête immédiate, la réunion de la morale et du dogme : ainsi chez Drey, Gengler, Staudenmaier, G. Riegler, J.-A. Stapf, etc. ; cf. J. Diebolt. La IMoloqie morale catholique en Allemagne. .., p. 285, 290, 307, 172 et 179 ; Fr. Tillmann, Kalholische Sittenlehre, t. iii, p. 38 sq. Fn même temps la volonté s’accuse de faire cesser la séparation entre la théologie d’une part, le monde et la culture d’autre part. Le programme dressé par Drey et inspirateur de l’école de Tubingue répond à cette intention ; en France, celui de Lamennais.

Enfin, le romantisme apporte en théologie le sens du vital et, pour ainsi dire, du vécu. Il reprend la requête sans cesse renouvelée au cours des âges : celle d’une théologie liée à la vie, voire d’une théologie où s’exprime la vie. Que la théologie soit liée au don fait par Dieu à l’homme d’une vie nouvelle, surnaturelle, qu’elle poursuive son travail dans une ambiance de toi et de piété, qu’elle inspire à son tour la vie ! Mais, dans l’école romantique de Tubingue, insuiïisamment affranchie de l’idéalisme philosophique et théologique allemand, la théologie apparaît comme trop référée à la foi vécue de l’Église ; les sources et les critères objectifs de la théologie n’y sont ni assez dégagés, ni assez mis en relief. Certes, jamais la théologie n’y a été définie, comme dans le protestantisme libéral issu de Schleiermacher, comme une analyse et une description de l’expérience religieuse ; la pensée des plus grands parmi les Tubingiens est foncièrement orthodoxe. Mais la théologie est, chez eux, trop conçue comme une réalisation intellectuelle de ce qu’a reçu et de ce dont vit l’Église et le théologien dans l’Église, pas assez comme une construction humaine d’une foi relevant d’un donné objectivement établi et de critères objectifs. La théologie, en un mot, est trop, pour eux, une science de la foi, pas assez une science de la Révélation.

Mattès, dans le Dict. encyclopéd. de la théologie cathol. de Welzer et Welte, trad. Goschler, t. xx.ui, p. 315 sq. ; Kd. Vermeil, J.-A. Môhler et l’école catholique de Tubingue (1815-1840), Paris, 1913, surtout p. 32-38, 66-78, 115-136 ; J. Geiselmann, Die Glaubenswissenschall der katholischen Tiibinger Schule und ihre Grundlegung durch J. Seb. uon Dreg, dans Tiibinger Quartidsclirijt, t. exi, 1930, p. 49-117 ; P. Ghaillet, L’esprit du christianisme et du catholicisme, dans Revue des sciences philos, et théol., t. XXVI, 1937, p. 483-498 et 713-726 ; et ici, ait. Sailer, t. xiv.col. 749 sq.

Le renouveau de la scolaslique.

Le xviiie siècle avait, dans l’ensemble, discrédité la scolastique médiévale. Aussi est-il notable que les premières interventions de l’autorité ecclésiastique en faveur de la scolastique furent pour la défendre contre l’accusation ou le soupçon de rationalisme. Cf. la condamnation de Ronnettꝟ. 1855 ; la Lettre Tuas libenler de Pie IX, 1863 : la 13e proposition du Sijllabus, Denz.-Bannw., n. 1652. 1680 et 1713.

Il ne rentre pas dans l’objet de cet article de tracer l’histoire de la restauration de la scolastique au cours du xixe siècle, depuis les efforts d’une tradition encore conservée en Espagne et surtout en Italie, jusqu’à l’encyclique JElerni Patris de Léon XIII, 4 août 1879, et aux documents qui l’ont suivie depuis. Cf. les art. Ki.eutgen, Perrone, Passaulia, Liberatore, Sanseverino. léon xiii, scolastique, thomisme ; Bellamy, La théologie catholique au XIXe siècle, Paris, 1904, [>. 41 sq., 145 sq. ; A. Musnovo, Il neolomismo in Ilalia. Originie prime vicende, Milan, 1923 ; A. Femi, Le vicende dcl pensiero lomislico nel seminario vescouile