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LES AVENTURIERS DE LA MER


hommes d’équipage et onze passagers, dont deux femmes. Les naufragés furent sauvés, après quarante et un jours de souffrances, par un navire qui les aperçut et les transporta au cap de Bonne-Espérance.

En 1819, le bâtiment français les Six-Sœurs fut la proie des flammes. Lorsque le capitaine Hodoul désespéra de l’efficacité des moyens employés pour combattre le développement du feu, il fit descendre dans le canot les femmes et les enfants qui se trouvaient à son bord. Des matelots hindous et des nègres voulaient absolument prendre place dans cet étroit canot ; mais le capitaine voyant l’impossibilité de sauver le canot, chargé de tant de monde, exposa la nécessité de l’alléger ; il déclara qu’on ne pouvait avancer à moins qu’une partie de ceux qui le montaient ne se sacrifiassent pour le salut des autres. Les passagers le soutinrent énergiquement, et les hommes de couleur reçurent l’ordre de regagner à la nage le navire en flammes. « Ces malheureux, dit le fils du capitaine dans sa relation, reconnaissaient si bien l’urgence et la justice de cette mesure, que plusieurs se précipitèrent d’eux-mêmes dans les flots ; mais la crainte de nous voir engloutis nous força d’en jeter à l’eau quelques autres qui ne pouvaient s’y résoudre. — Le canot avait dix-huit pieds de long, il restait trente-huit personnes à bord. Les provisions se réduisaient à deux bouteilles d’eau, deux jeunes porcs, deux cabris et deux tortues de terre que le hasard fit trouver dans le canot, lors de la mise à la mer. Avec tant de monde, il n’avait que quatre pouces de bordage hors de l’eau. »

Et la terre la plus proche se trouvait à cent cinquante milles de distance ! Malgré le calme de la mer, la lame atteignait le plat-bord du canot.

Le capitaine avait eu soin de placer dans le canot le compas et un sextant, de sorte qu’il était possible de suivre une direction. Lorsque le canot s’éloigna, il laissa le navire courant tout en feu, ses mâts près de tomber l’un après l’autre.

On était au 1er août et ce n’est que le 11 de ce mois que la terre fut en vue, — l’île de la Digue : il y avait plusieurs jours que les naufragés étaient aux prises avec des difficultés sans cesse renaissantes, souffrant plutôt de la soif que privés de nourriture, parce qu’on avait eu la ressource de manger les animaux… Un nègre et l’enfant d’une négresse moururent après avoir touché terre, malgré les secours que l’on trouva dans l’île de la Digue. Les autres naufrages furent embarqués pour Mahé, l’une des Seychelles.