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LES AVENTURIERS DE LA MER


provoquait une inclinaison très sensible sur le flanc droit, et comme un navire chargé de marbre ne se relève pas à la lame, tous assurèrent, qu’en cas de gros temps, une catastrophe était inévitable.

Le vapeur était à peine au large qu’il rencontra une mer démontée et furieuse : il roulait horriblement sur place sans pouvoir avancer. Enfin, vers 9 heures du soir, on signalait les feux du port de Savone. À ce moment une lame monstrueuse, balayant le pont du bateau, brisa la cloison qui séparait les bœufs, qui se répandirent furieux sur le pont. Une seconde lame fit pencher brusquement le vapeur, et les blocs de marbre mal arrimés glissèrent à tribord. La Ville-de-Malaga, couchée sur le flanc, enfonçait visiblement…

Alors ce fut un sauve-qui-peut général. L’équipage, malgré les ordres réitérés du capitaine, refusa de sauver d’abord les passagers. Les hommes s’embarquèrent sur les trois canots faciles à mettre à la mer, en emmenant seulement quelques passagers. Pendant ce temps les lames se succédaient, emportant des victimes : en une seule fois dix pauvres enfants calabrais, cramponnés à un mât. Quelques passagers robustes et le capitaine, dans un effort désespéré, parvinrent à mettre à la mer la grande chaloupe, et tous les survivants s’embarquèrent. Il était onze heures du soir. Le navire sombra presque aussitôt.

Les malheureux, après douze heures de lutte contre une mer furieuse, atteignirent Savone. Quant aux trois canots de l’équipage, deux vapeurs envoyés à leur secours les recueillirent successivement. Mais par suite de la conduite inqualifiable de l’équipage, quarante-cinq passagers sur soixante-six périrent. En revanche, les vingt-huit hommes de l’équipage se retrouvaient au complet.

Mais ce qui est navrant au delà de toute expression, c’est la perte totale de ces navires dont on n’a plus jamais de nouvelles ! Et quelles sont nombreuses ces catastrophes ! Chaque année en compte des centaines ! Après l’événement, lorsqu’un temps plus que suffisant s’est écoulé sans aucun indice, on cherche à se rendre compte des causes qui ont pu amener la perte du navire.

Un des faits les plus douloureux à citer, est la disparition, il y a quelques années, du vaisseau-école anglais, à bord duquel chaque grande famille d’Angleterre comptait un ou plusieurs de ses enfants parmi les élèves. Le Royaume-Uni tout entier fut plongé dans le deuil. Ces vaisseaux-écoles ne sont jamais des navires neufs. Celui-ci était sorti pour manœuvrer au large, par un temps favorable. Il est permis de