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LES AVENTURIERS DE LA MER


supposer qu’une voie d’eau se fit jour assez promptement dans ses flancs pour rendre même impossible la mise à la mer des embarcations.

Au mois de mars 1895, ce fut au tour de l’Espagne d’être affligée par une catastrophe du même genre ; mais celle-ci produite par un gros temps : nous voulons parler de la perte totale du croiseur Reina-Regente. Ce navire parti de Tanger pour Cadix ne parvint jamais à destination. On sut qu’il avait été rencontré dans sa traversée par deux vapeurs étrangers : le vent soufflait en tempête et la mer était très grosse ; le croiseur était désemparé d’une de ses cheminées et de sa passerelle ; sa situation semblait assez critique ; mais comme il ne demandait pas de secours et que l’état de la mer rendait fort difficile toute manœuvre pour l’approcher, l’un après l’autre les deux navires qui avaient aperçu la Reina-Regente poursuivirent leur route.

L’absence de nouvelles du croiseur qui n’avait eu à effectuer qu’un si court voyage, laissait l’Espagne sous le coup d’une émotion poignante et de la plus cruelle des incertitudes, lorsque le 19 mars on apprit de source certaine que le malheureux navire avait coulé à fond à peu de distance de la côte espagnole, au nord-ouest du cap de Trafalgar, sur le banc dit Aceitunas Bajos, en face de la petite ville de Cornil : le croiseur Alfonso XII venait de découvrir l’épave de la Reina-Regente, dont les mâts seuls dépassaient de quelques pieds à peine la surface de la mer. Cent douze marins et officiers composant l’équipage avaient péri à quelques encablures des côtes de la patrie !

Le croiseur espagnol mesurait cent mètres de long sur quinze de large ; sa machine de 12 000 chevaux, actionnant deux hélices, lui donnait vingt nœuds de vitesse. Son armement était très puissant, mais d’un poids inégalement réparti. On présume que les quatre canons de vingt et un centimètres, placés trop près des extrémités, auront contribué à empêcher de s’élever à la lame un navire ayant éprouvé de sérieuses avaries dès le début d’un mauvais temps.

Sur la côte dangereuse d’Ouessant, le 16 juin 1896, le steamer anglais Drummond-Castle, qui se rendait du cap de Bonne-Espérance à Londres, toucha sur une roche située à l’ouest de l’île Molène et coula à pic en moins de trois minutes.

Il avait à son bord cent hommes d’équipage et deux cents passagers, parmi lesquels beaucoup de femmes et d’enfants. Trois hommes seulement purent être recueillis vivants. L’un d’eux, M. Charles Marquardt, le seul passager qui ait survécu au sinistre, a raconté que le jour du