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Page:Anatole France - Thaïs.djvu/225

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riant à son ami le présent agréable qu’il en a reçu. C’est pourquoi je vois cette femme avec plaisir, assuré que sa vision vient de toi, Tu veux bien ne pas oublier que je te l’ai donnée, mon Jésus. Garde-la puisqu’elle te plaît et ne souffre pas surtout que ses charmes brillent pour d’autres que pour toi.

Pendant toute la nuit il ne put dormir et il vit Thaïs plus distinctement qu’il ne l’avait vue dans la grotte des Nymphes. Il se rendit témoignage, disant :

— Ce que j’ai fait, je l’ai fait pour la gloire de Dieu.

Pourtant, à sa grande surprise, il ne goûtait pas la paix du cœur. Il soupirait :

— Pourquoi es-tu triste, mon âme, et pourquoi me troubles-tu ?

Et son âme demeurait inquiète. Il resta trente jours dans cet état de tristesse qui présage au solitaire de redoutables épreuves. L’image de Thaïs ne le quittait ni le jour ni la nuit. Il ne la chassait point parce qu’il pensait encore qu’elle venait de Dieu et que c’était l’image d’une sainte. Mais, un matin, elle le visita en rêve, les cheveux ceints de violettes, et si re-