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Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome II.djvu/224

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si je ne me trompe, s’étaient trouvés subitement en danger de mort. Leur mère, qui avait remarqué que la jeune fille était consacrée à Dieu, espéra que ses prières pourraient sauver ses fils de la mort qui les menaçait ; elle lui demanda de prier pour eux, lui promettant qu’elle serait rendue à ses parents, si elle obtenait la guérison des trois malades. La jeune fille jeûna, pria, et fut aussitôt exaucée ; car c’était le but de cet événement, autant du moins que le résultat permet d’en juger. Les Barbares, ayant ainsi recouvré la santé par une faveur soudaine de Dieu, admirèrent la jeune captive, lui donnèrent des marques de respect et remplirent la promesse de leur mère.

8. Priez donc Dieu pour les saintes femmes captives, priez pour qu’il leur enseigne à porter, comme Azarias, dont j’ai rappelé plus haut le pieux et édifiant souvenir, parlait en répandant sa prière et ses aveux devant Dieu. Car elles sont dans le pays de leur captivité comme les trois jeunes hommes sur cette terre où, pas plus que ces femmes, ils ne pouvaient offrir leurs sacrifices accoutumés, ni porter leurs dons à l’autel de Dieu, ni trouver un prêtre pour les présenter au Seigneur. Que Dieu leur fasse donc la grâce de dire, ainsi qu’Azarias dans la suite de sa prière : « Nous n’avons plus ni prince, ni prophète, ni chef, ni holocaustes, ni offrandes, ni prières, ni lieu pour vous offrir des sacrifices et trouver votre miséricorde ; mais recevez-nous, Seigneur, dans un cœur contrit et, un esprit d’humilité. Que notre sacrifice se consomme aujourd’hui devant vous, et qu’il vous rende agréables vos serviteurs, comme si nous vous offrions des holocaustes de béliers et de taureaux, et une multitude d’agneaux gras ; parce que ceux qui mettent leur confiance en vous, ne tomberont point dans la confusion. Et maintenant nous vous suivons de tout notre cœur, nous vous craignons et nous cherchons votre face, Seigneur ; ne nous confondez pas, mais, traitez-nous selon votre douceur et selon la multitude de vos miséricordes ; délivrez-nous par des, merveilles, et donnez la gloire à votre nom, Seigneur ; que tous ceux qui préparent des maux à vos serviteurs vous craignent ; qu’ils soient confondus par votre toute-puissance, que leur force soit brisée, et qu’ils sachent que seul vous êtes le Seigneur Dieu, le Dieu de gloire sur toute la terre[1]. »

9. Dieu assistera celles qui parleront et qui gémiront ainsi devant lui, car il n’oublie jamais les siens, et il ne permettra pas qu’aucune injure soit faite à ces chastes femmes ; ou bien, s’il le permet, il ne leur imputera point. Quand l’âme ne se souille point par un consentement impur, elle sauve le corps de toute atteinte criminelle ; et si la passion de celui qui souffre violence n’a rien fait ni rien permis, l’attentat n’est imputable qu’à celui qui en est l’auteur ; il doit être considéré, non comme une corruption honteuse, mais comme une blessure douloureuse. La chasteté du cœur est d’un si grand prix que, si elle demeure entière, le corps gardé une pureté parfaite malgré le coupable triomphe de la brutalité. Que votre charité se contente, de cette lettre, bien courte en comparaison de ce que vous auriez désiré ; longue, pourtant,, si je songe à mon peu de loisir, et trop rapidement écrite, parce que le porteur était pressé. Le Seigneur vous consolera bien autrement si vous lisez attentivement ses Écritures. 

LETTRE CXII.


(Au commencement de l’année 410.)

L’évêque d’Hippone invite aux pensées et aux perfections chrétiennes an ancien proconsul d’Afrique, appelé Donat, qui paraît avoir eu une renommée d’homme de bien. (Voir ci-des. lett. C.)

AUGUSTIN A SON CHER, EXCELLENT ET HONORABLE FRÈRE LE SEIGNEUR DONAT, SALUT DANS LE SEIGNEUR.

1. Je n’ai pu, malgré mon vif désir, vous voir, même â votre passage à Tibilis, quand vous remplissiez encore les devoirs de votre charge ; cela est arrivé, je crois, pour que je, jouisse de votre esprit lorsqu’il serait débarrassé des affaires publiques : j’en jouirai bien plus maintenant que dans une visite où, assez libre de mon temps, je vous aurais trouvé très-occupé, sans que nous pussions être satisfaits ni l’un ni l’autre. En me rappelant quelle était, dès votre premier âge, la noblesse de votre caractère, je n’hésite pas à croire votre cœur très-propre à recevoir une abondante effusion de l’esprit de Jésus-Christ, et à lui donner des fruits qui vous mériteront plutôt l’éternelle gloire du ciel que les éphémères louanges de la terre.

2. Beaucoup de gens, ou plutôt tous ceux que

  1. Dan. III, 38-45.