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Page:Barbey d’Aurevilly - Une histoire sans nom, 1882.djvu/133

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désespéré pris par elle, la certitude qu’elle ne pourrait convaincre sa mère de son innocence devant le signe visible de sa grossesse ? Mais cette tendresse, si soudainement montrée, de madame de Ferjol, cette confiance qui appelait la confiance, cette confession d’une faiblesse égale à la sienne qui devait tant coûter à l’orgueil d’une mère vis-à-vis de sa fille, ne pénétrèrent pas dans l’âme de Lasthénie, qui ne s’était jamais ouverte à sa mère, et que, d’ailleurs, la douleur de son incompréhensible état idiotisait. Il était trop tard ! Lasthénie avait cru longtemps à tout autre chose qu’une grossesse. Elle avait connu dans la bourgade même qu’elle habitait une malheureuse qu’on avait crue grosse, et qu’on avait déshonorée et traînée sur la claie des plus mauvais propos pendant les mois de sa grossesse, mais qui, les neuf mois écoulés, resta grosse… d’un horrible squirre dont elle n’était pas morte encore, et qui, certainement, devait un jour la faire mourir. Lasthénie, comble de l’infortune ! Lasthénie avait espéré en ce squirre comme on espère en Dieu. « Ce sera toute ma vengeance, — pen-