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Page:Beckford - Vathek, éd. Mallarmé, 1893.djvu/192

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chenrouz ; mais toutes ces images étaient confuses dans sa tête. Ce lac singulier, ces flammes réfléchies dans les eaux paisibles, les pâles couleurs de la terre, ces cabanes bizarres ; ces joncs qui se balançaient tristement d’eux-mêmes ; ces cigognes, dont le cri lugubre se mêlait aux voix des nains ; tout la convainquit que l’ange de la mort lui avait ouvert le portail de quelque nouvelle existence.

Gulchenrouz, de son côté, dans des transes mortelles, s’était collé contre sa cousine. Il se croyait aussi dans le pays des fantômes, et s’effrayait du silence qu’elle gardait. Parle, lui dit-il enfin, où sommes-nous ? Vois-tu ces spectres qui remuent cette braise ardente ? Seraient-ce Monkir et Nekir qui vont nous y jeter ? Le fatal pont traverserait-il ce lac, dont la tranquillité nous cache peut-être un abîme d’eau, où nous ne cesserons de tomber pendant des siècles ?

— Non, mes enfants, leur dit Sutlemémé en s’approchant d’eux, rassurez-vous ;