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Page:Belloy - Christophe Colomb et la decouverte du Nouveau Monde, 1889.djvu/143

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qu’admira le plus Christophe Colomb dans cette île merveilleuse, ce furent les dimensions plus vastes des mêmes objets qui avaient ailleurs charmé ses regards. Les fleuves, les lacs, les forêts, les montagnes, tout avait là un caractère d’ampleur, de force, de majesté sereine, qui, sans écraser la pensée, l’alanguissait dans une contemplation muette et passive. Colomb avoue qu’il eut grand’peine à s’arracher de ces lieux, où il lui semblait vivre dans un monde d’enchantements et de prestiges.

Les noms qu’il donna aux points principaux de cette île privilégiée témoignent, presque tous, de son admiration ou de sa piété. La plupart ont été changés, même celui de Juana, qui certes valait bien le nom de Cuba. Le Port-Saint est devenu Bararoa ; du cap des Palmiers, du fleuve de la Lune, du fleuve des Mers on a fait la colline de Juan Danue, le havre de Bajes, le havre de la Nativité du Prince.

Aux environs de ce dernier, les Indiens qu’il avait à bord indiquèrent, comme voisin, un lieu nommé Bohio, où abondaient, à les croire, l’or, les perles et les épices. Ils parlaient aussi d’hommes à un seul œil ; d’une île Mantinino, habitée uniquement par des femmes ; d’hommes à tête de chien, mangeant la chair et buvant le sang des autres hommes. La première de ces relations doit être rangée avec celles dont fait déjà mention Hérodote. La seconde fut reconnue comme vraie en partie : il existait dans ces régions une île habitée par des femmes, mais seulement pendant quelques mois de l’année. Quant aux anthropophages à tête de chien, il n’y avait que trop de vrai dans leur légende. Ces monstres, auxquels on aurait voulu ne point trouver figure humaine, étaient