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Page:Belloy - Christophe Colomb et la decouverte du Nouveau Monde, 1889.djvu/184

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avec autant de naïveté que les petites gens, devant l’étrange pompe de son cortège.

Il y avait là, en partie, les éléments et, à proprement parler, les germes d’une des plus grandes révolutions économiques qui se soient produites dans le monde.

En tête, marchaient les pilotes et les bas officiers de la Niña, dont un des principaux était chargé du grand étendard de l’expédition. Les matelots, mousses et novices venaient à la suite, portant liés à des perches, à des avirons, à des piques, les plus curieux échantillons des productions végétales, minérales et animales du nouveau monde : branches de divers arbres, chargés de leurs fruits, tels qu’entre autres le cacao, dont les amandes allaient bientôt fournir à l’Europe, et surtout à l’Espagne, un aliment d’un usage si général ; des noix de cocos, des régimes de bananes, d’énormes calebasses, une grande variété d’épices et de plantes médicinales, les unes déjà connues, les autres nouvelles ; des roseaux gros comme le corps d’un enfant ; des fougères arborescentes ; des rameaux de cotonnier, avec leurs gousses entr’ouvertes, d’où s’envolait, pareille à de légers flocons de neige, une matière destinée à vêtir un jour presque tous les habitants du globe, à les armer les uns contre les autres, à soulever périodiquement parmi eux des questions de vie ou de mort, des guerres fratricides, sans quartier et sans fin.

Parmi ceux des végétaux dont la substance et la forme avaient le mieux résisté aux effets d’une longue traversée en mer, se dressaient de hautes tiges, couronnées d’énormes épis, aux grains, les uns pourpres comme des grenats, les autres transparents et dorés comme de l’ambre, et à la cime desquels ondulait un soyeux