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Page:Belloy - Christophe Colomb et la decouverte du Nouveau Monde, 1889.djvu/211

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cases. À peine le commandant pouvait-il retenir chaque soir, au fort, une dizaine de ces imprudents, et encore se refusaient-ils à faire sentinelle pendant la nuit.

Sans cette division et cette incurie, révélées à Caonabo par une population outrée, jamais ce chef n’eût même songé à tenter ce massacre dont la responsabilité doit peser tout entière sur ses victimes.

Quoi qu’il en fût, l’espoir d’une conquête pacifique était désormais perdu, et la résistance des Indiens avait trouvé un instigateur et un chef que l’Amiral se réserva de châtier et d’abattre en temps opportun.

Pour le moment, ce qui le pressait davantage, c’était de créer un centre d’action, et au besoin, de défense, autour duquel pût se grouper avec sécurité la colonie européenne. À cet effet, il avait institué, dès l’arrivée, une commission qui eut bientôt trouvé l’emplacement le plus favorable qu’on pût rêver. Les eaux, la pierre, les bois de charpente, rien n’y manquait ; et bientôt, grâce au concours des Indiens pacifiés par la seule présence de l’Amiral, s’éleva, pour devenir un jour la capitale espagnole de Saint-Domingue, une petite cité qui, le 6 janvier, jour anniversaire de la prise de Grenade, reçut le nom d’Isabelle.

Deux mois avaient suffi pour improviser cette ville avec ses défenses. Dans le même espace de temps, certaines graines venues de l’ancien continent avaient déjà fructifié dans ce terrain merveilleusement favorable, grande ressource pour la colonie menacée de disette par l’insuffisance des provisions apportées d’Europe.