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Page:Belloy - Christophe Colomb et la decouverte du Nouveau Monde, 1889.djvu/212

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Colomb, qui, on le sait, se trouvait malade au moment du départ, avait été indignement trompé sur la quantité et surtout la qualité de toutes les denrées, médicaments, bêtes de somme et objets d’échange embarqués par provision sur la flotte, Ces fraudes et ces innombrables méfaits ayant été reconnus et dénoncés, ils ne manquèrent pas, on peut le croire, d’ajouter à la liste des ennemis de l’Amiral, les fournisseurs de la marine qui tous étaient des personnages importants.

Parmi ceux-ci, les plus dangereux, par un reste d’attaches et de crédit qu’ils avaient gardé à la cour, étaient ces hidalgos, tous plus ou moins déclassés et endettés, dont on a déjà dit un mot en passant. Venus à la suite de Colomb, dans la pensée de s’enrichir en peu de jours, dans une oisiveté pleine de délices, ils s’en prenaient à lui de déceptions dont ils n’auraient dû accuser qu’eux-mêmes.

Contre toute raison et toute apparence, ces mécontents trouvèrent un appui moral dans le père Boïl, vicaire apostolique de l’expédition, lequel avait dû à une erreur de nom sa nomination à ce poste important. Homme intègre, du reste, et de mœurs pures, mais politique à la fois sombre et puéril, qui ne pardonnait pas, entre autres choses, à Colomb de lui avoir refusé la tête de Guacanagari. Le ressentiment lui fit épouser les griefs de ces nobles fainéants, qui se plaignaient surtout d’être soumis à un égal partage dans les rudes travaux manuels et les faibles rations de vivres distribuées entre tous les colons.

Cette mesure, rendue indispensable par les raisons que l’on a vues, un chrétien, un religieux, homme de cour, à la vérité, osa proposer à Colomb de la rapporter, et sur son refus il l’excommunia.