Page:Bernard - Federic de Sicile.djvu/62

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ÉLÉGIE

Quoy ! donc mon laſche cœur ne peut plus ſe deffendre,
Il reſſent malgré moy je ne ſçay quoy de tendre,
Luy qui vit en ſecret plus d’un cœur agité,
Et ſeul s’applaudiſſoit de ſa tranquillité ;
Si ſuperbe autrefois, maintenant il s’étonne,
Au trouble qu’il donnoit luy-même il s’abandonne ;
Et par de fiers apas reduit & deſarmé,
Malgré mille froideurs il ſe trouve enflamé.
Où ſont tous ces deſſeins qu’en mon indifference,
Ie formois de braver l’amour & ſa puißance ?
Ie me flatois qu’exempt de la commune loy
Ce cœur bien deffendu ſeroit toûjours à moy,
Ou qu’un aimable objet rendant mon ame épriſe
L’abſence de mes ſens vengeroit la ſurpriſe :
Ie penſois fuir les jeux qui m’auroient ſçeu bleßer,
Ou prendre un peu d’amour ſans trop m’interreſſer.