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Page:Bernard - Federic de Sicile.djvu/78

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re paroiſtre, que pretendez-vous faire ? ne m’aimez point, ou dites-moy que vous m’aimez. La tendreſſe languit toûjours ſi elle eſt retenüe par une crainte triſte & froide, que vous prenez peut-étre pour du reſpect : ne vous y trompez pas, le respect eſt moins farouche, il parle, puis il ſe retient, mais toûjours il a parlé, il commence ce qui s’acheve de ſoy-même, & quel plaiſir pour celuy qui aime, de le faire penſer, & pour celle qui eſt aimée de le penſer auſſi, & de deviner le reſte de ce qu’on ne luy a dit qu’à demy : ſi vous n’aimez que moy, vous croirez bien que ce n’eſt que moy qui vous écris. Cependant pour plus grande ſeureté, trouvez-vous dans la grande allée du Rondeau, vous m’y pourrez parler, & là je pourray vous entendre.

Ce billet dont il ne ſçavoit reconnoiſtre le caractere, auroit réjoüy Federic daus un autre temps, ſi la tendreſſe qui l’occupoit ne luy euſt donné des mouvemens fort oppoſez à la joye. Il admiroit la bizarrerie de l’amour dans ces deux billets, quand on luy en apporta un troiſiéme. Il l’ouvrit avec aſſez de precipitation & y lût.