Aller au contenu

Page:Bird - Voyage d’une femme aux Montagnes Rocheuses, 1888.pdf/22

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
14
VOYAGE D’UNE FEMME

se rappelant qu’il les avait dépassés en portant une dame, ils craignaient qu’il n’y eût eu un accident et ils venaient de seller un de leurs propres chevaux pour aller à ma recherche. Il m’apporta de l’eau pour laver mon visage couvert de poussière et sella de nouveau ma monture ; mais elle se déroba, s’ébroua avant de vouloir me laisser monter, et alors s’en alla de côté d’une manière si nerveuse, que le conducteur marcha près de moi pendant quelque temps pour me voir « all right ». Il me dit que les bois qui avoisinent Tahoe étaient remplis d’ours gris et bruns, mais qu’il n’y avait rien à craindre. Je galopai longtemps au delà de l’endroit où j’étais tombée, afin de tranquilliser mon cheval qui était très-inquiet et fatigant.

Le paysage devint alors vraiment magnifique et resplendissant de vie. Des geais bleus huppés volaient à travers les pins sombres, des centaines d’écureuils couraient à travers la forêt, des libellules rouges étincelaient comme une « lumière vivante », de délicieux écureuils rayés traversaient le chemin, mais seul, ici et là, un poudreux lupin bleu me rappelait de plus beaux enfants de la terre. La rivière, calme et large, reflétait dans ses profondeurs transparentes des pins royaux droits comme une flèche, le tronc couvert de lichens verts et d’un beau jaune ; des sapins et des pins balsamiques remplissaient les espaces laissés entre eux. La gorge s’ouvrait, et j’avais devant moi ce lac avec sa ceinture de montagnes, ses bords découpés en baies et en promontoires revêtus pittoresquement d’énormes pins à sucre. Il se ridait et scintillait doucement au soleil de midi, aussi intact qu’il y a quinze