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Page:Blanqui - Cours d’économie industrielle 1836-1837.djvu/388

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Jacquard n’est pas le seul qui, en voulant enrichir son pays, a encouru pendant un temps sa malédiction ; il en fut de même des inventeurs du métier à ruban, connu sous le nom de Barr-Loom. Cette machine, d’origine suisse, avait été importée à Saint-Étienne par deux frères, qui furent persécutés par les rubaniers de l’ancien régime, et réduits par eux à la plus extrême misère ; il n’y a pas long-temps que le dernier est mort abandonné dans un hôpital, tandis que la machine qu’il avait apportée en France enrichissait ceux qui l’avaient poursuivi et ruiné. Vous savez que le même sort fut le partage de Louis Robert, l’inventeur de la première machine à fabriquer le papier continu, et qui mourut, lui aussi, dans un hôpital, au moment où les fabricants dont il avait fait la fortune songeaient à se réunir pour lui assurer une existence indépendante : justice tardive, qui n’en montre pas moins que les inventeurs, ces hommes si utiles à leur pays, sont presque toujours martyrs de leur dévouement, et qu’ils sacrifient en pure perte pour eux leur santé et leur fortune ; la postérité seule vient, mais trop tard, les récompenser de leurs veilles et de leurs travaux.

Comme je viens de vous le dire, le métier Jacquard n’a pas servi seulement aux progrès de l’industrie des soies, il en a fait avancer aussi beaucoup d’autres qui, sans lui, seraient restées stationnaires. C’est à la facilité de produire mille étoffes revêtues de dessins différents que nous devons de voir nos produits recherchés sur tous