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Page:Boisgobey - Rubis sur l'ongle, 1886.djvu/107

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— Un ancien ami de mon père que j’ai retrouvé avant-hier à la soirée de Mme de Malvoisine.

— Le colonel Mornac, n’est-ce pas ?

— Vous le connaissez ?

— Oui, pour l’avoir vu quelquefois chez la comtesse. Il m’a toujours témoigné de la sympathie et je suis sûre qu’il ne vous a pas mal parlé de moi.

— Il m’a fait de vous un chaleureux éloge… et il m’a laissé entendre qu’il y a dans votre vie un douloureux mystère. Si j’osais vous demander…

— De vous raconter mon histoire. Si j’y consentais, vous seriez le premier à qui je l’aurais dite toute entière.

— Vous me donneriez donc une marque de confiance qui me toucherait profondément.

La jeune fille hésita. Elle regardait Robert pour tâcher de lire dans ses yeux si l’intérêt qu’il semblait lui porter ne cachait pas quelque arrière-pensée.

— Soit ! dit-elle après un silence. Quand vous me connaîtrez mieux, je serai moins gênée pour vous dire ce que j’attends de vous. Mon passé vous expliquera ma situation présente. Seulement, je vous préviens que mon récit sera un peu long. Si vous tenez à l’entendre, nous ferons bien de nous asseoir sur ce banc.

Le siège qu’elle indiquait était de marbre blanc et il devait dater de l’époque où fut plantée cette partie du jardin. Les arbres, dépouillés de leurs feuilles, ne l’abritaient guère ; mais il faisait ce jour-là un temps qui permettait de s’y chauffer au soleil, dont les rayons illuminaient doucement la grande avenue des Champs-Élysées et l’Arc de Triomphe de l’Étoile.