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Page:Boisgobey - Rubis sur l'ongle, 1886.djvu/132

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— J’ai emprunté pour m’acquitter.

— Autre sottise. À qui as-tu emprunté ?

— À un usurier qu’on m’a indiqué.

— De plus fort en plus fort. Pourquoi ne t’es-tu pas adressé à moi, animal ?

— Je n’ai pas osé. Il s’agissait de dix mille francs.

— Peste ! tu vas bien quand tu t’y mets. Et pour parer à l’échéance du billet que tu as souscrit, tu vas être obligé d’hypothéquer tes terres. Tu prends le même chemin que ton père, mon garçon, et ça te mènera plus loin que lui, car il a eu la chance de mourir à temps. Toi, tu mettras ta mère sur la paille.

— J’aimerais mieux me brûler la cervelle.

— Tu en arriveras là, si tu continues. Et si tu tiens à ta peau, tu n’as plus qu’un parti à prendre. Engage-toi, et sois soldat plutôt que batteur de pavés.

— Je ne compte pas rester oisif… Il ne tient qu’à moi de gagner beaucoup d’argent.

— Par quel procédé, je te prie ?

— En travaillant… à la Bourse.

— C’est-à-dire en jouant sur la hausse ou la baisse. Tu appelles cela travailler ? Est-ce ton ami Gustave qui t’as mis en tête cette belle idée ?

— Pourquoi vous cacherais-je que… hier… il m’a associé, sans m’en avertir, à une spéculation qu’il croyait sûre et qui a bien tourné, puisque pour ma part, j’ai gagné quelque chose comme trente-cinq mille francs.

— Voilà un remisier bien généreux !… et tu les as touchés les trente cinq mille ?

— Pas encore. Et même j’hésite à les prendre.