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Page:Boisgobey - Rubis sur l'ongle, 1886.djvu/158

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premier mouvement fut de lever le nez en l’air.

Il ne vit personne aux fenêtres de la tour en démolition. Les autres maisons du même côté n’avaient pas d’ouvertures sur la ruelle. Le projectile qui venait de l’atteindre ne pouvait donc avoir été lancé que par le vasistas où Robert avait jeté des plâtras, du haut du belvédère.

C’était la réponse attendue qui arrivait enfin sous la forme d’un corps rond, enveloppé dans du papier, ni plus ni moins gros qu’une bille de billard, mais moins dur et moins lourd, fort heureusement pour l’épaule qui avait reçu le choc.

Robert se précipita pour le ramasser et fut tout surpris de trouver sous l’enveloppe une pomme de qualité inférieure ; de celles que les marchandes ambulantes vendent au tas.

Ce singulier envoi le déconcerta un peu. Il pensait qu’un message lui arrivait, et il recevait un fruit avarié. Il y avait bien de quoi s’étonner.

Il se demanda d’abord si ce n’était pas quelque mauvais gamin qui s’amusait à le bombarder ainsi, mais il réfléchit qu’on n’avait pas pu le viser. Si la pomme en tombant l’avait atteint, c’était par hasard, puisque la personne qui l’avait jetée ne pouvait pas le voir, rasant le mur, juste au-dessous de la gouttière.

Il se dit aussi qu’un prisonnier qui veut, du fond de son cachot, donner signe de vie aux gens du dehors se sert de ce qu’il a sous la main.

La personne enfermée avait bien pu lancer, faute de mieux, une pomme qui sans doute faisait partie de la pitance qu’on lui apportait quotidiennement pour l’empêcher de mourir de faim.