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Page:Boisgobey - Rubis sur l'ongle, 1886.djvu/220

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— On ne tuera pas le veau gras, mais tous les chapons de vos fermiers y passeront, dit le colonel qui affectait de plaisanter pour dissimuler son émotion.

Il continua :

« Nous vivrons ensemble, et nous ne nous quitterons plus, jusqu’au jour où Dieu me rappellera à lui. Et tu ne regretteras pas les fausses joies de cette ville maudite qui m’a pris mon fils. Je sais qu’à ton âge, tu ne peux pas te contenter de l’existence que je mène à Rennes. Mais je t’ai trouvé une adorable jeune fille qui t’aime et qui est toute prête à t’épouser. Elle te rendra heureux, elle te donnera de beaux enfants que nous élèverons ensemble et elle t’apportera une magnifique fortune qui te permettra de satisfaire les goûts de dépenses que tu tiens de ton pauvre père.

« Dis-moi que tu consens et arrive bien vite. Ta fiancée t’attend. Tu as deviné de qui je parle.

— As-tu vraiment deviné ? demanda M. de Mornac.

— Oui, balbutia Robert. Il s’agit d’une demoiselle que j’ai vue l’été dernier.

— Mais tu es épris de Mlle Violette. Nous causerons de cela tout à l’heure. J’achève d’abord ma lecture.

« Si tu refusais, si tu restais sourd à mes prières, je te préviens, mon cher enfant, que je n’hésiterais pas. Je partirais pour Paris. Il y a bien une place pour moi dans ce petit appartement que j’ai pris tant de plaisir à arranger. Tu m’y recevrais, n’est-ce pas ? Et tu me laisserais te choyer comme aux jours de ton enfance. Mais tu ne voudras pas m’im-