Aller au contenu

Page:Boisgobey - Rubis sur l'ongle, 1886.djvu/223

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

t’épouser malgré toi et qui mettrait le feu au théâtre pour empêcher ta petite amie de réussir.

Robert allait protester que ces gens-là ne lui faisaient pas peur, mais M. de Mornac s’écria, en s’avançant vivement vers une porte entrebâillée, au fond du fumoir :

— Qu’est-ce que tu fais ici, toi ?… Tu nous espionnes, je crois.

En même temps, il saisissait par le collet de sa veste le groom Jeannic et il l’amenait devant son maître stupéfait.

— Mais, non, monsieur, dit le groom. Je n’écoutais pas, je vous le jure. Quand vous m’avez attrapé, j’étais en train d’épousseter les portières.

— Où as-tu pris ce gars-là ? demanda le colonel à Robert.

— Aux environs de Rennes. Il est né sur une de nos terres, et je n’ai pas encore eu à me plaindre de lui.

Jeannic baissait la tête ; mais il paraissait médiocrement effrayé, il n’avait guère plus de dix huit ans, et il paraissait en avoir plus de vingt. C’était un vrai Breton, large d’épaules, avec une tête ronde, une figure intelligente et des yeux bruns qui savaient regarder en face.

— C’est bon ! reprit M. de Mornac, en le poussant dans la chambre voisine. Disparais et que je ne t’y reprenne plus.

Et il ferma la porte sur lui.

— Tu sais, dit-il à Robert, on ne m’ôtera pas de l’idée qu’il nous écoutait. À ta place, moi, je ne le garderais pas.

— Je vous assure, mon colonel, qu’il m’est très