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Page:Boisgobey - Rubis sur l'ongle, 1886.djvu/264

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L’effet se produisit immédiatement, mais en sens inverse de ce qu’il espérait.

À peine eut-elle jeté les yeux sur les objets qu’il lui montrait qu’elle se leva toute droite, en criant :

— Ce n’est pas vrai. Je n’ai rien écrit… Je n’ai rien jeté… Vous mentez… Vous inventez cela pour qu’on me batte… Vous êtes un méchant homme… Allez-vous-en… Je ne veux plus vous voir… Si vous me parlez encore, je ne vous répondrai plus.

Et avant qu’il eût eu le temps de la retenir, elle s’enfuit au fond du grenier pour s’y cacher de nouveau derrière le paravent.

Cette fois, c’était bien de la folie et presque de la folie furieuse, car elle se mit à jeter des cris lamentables.

Bécherel ne savait plus que faire et il commençait à se demander si l’expédition qu’il avait entreprise n’était pas aussi folle que cette femme qui passait en une seconde de l’abattement à l’exaspération et qui lui échappait, au moment même où il croyait la tenir. Comment la ramener maintenant ? Comment calmer cet accès subit et faire entendre raison à une aliénée par intermittence ? Il ne pouvait plus se flatter de remettre l’entretien au point où il l’avait conduit avant la malencontreuse exhibition qui avait tout gâté.

Le pis était que les cris ne cessaient pas. Elle hurlait maintenant des mots inintelligibles et il reconnaissait parfaitement la voix qu’il avait entendue lorsqu’il s’était égaré dans le corridor, le jour de sa visite à Marcandier. Seulement, cette voix s’élevait à un tel diapason qu’elle devait porter jusque dans la rue.