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Page:Boisgobey - Rubis sur l'ongle, 1886.djvu/288

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Bois dans leur victoria, constellée de couronnes comtales. Il se dispensa naturellement de les saluer et il crut voir la belle Herminie lui lancer un regard de défi, accompagné d’un sourire railleur. Mais cette muette déclaration de guerre l’affecta médiocrement, car il savait déjà à quoi s’en tenir sur les intentions de la demoiselle. Il continua sa promenade jusqu’à l’Arc de triomphe, se fit ramener à la place de la Concorde, renvoya son fiacre et s’en alla dîner chez Le Doyen, au moment où la nuit tombait.

Une station d’une heure à une table bien servie rasséréna ses idées et dissipa ses derniers doutes à l’endroit de la prétendue trahison du colonel. Il aperçut clairement l’invraisemblance de l’accusation et il se promit bien de n’y plus penser jusqu’au lendemain. Il dîna même assez agréablement, et il était dans d’excellentes dispositions d’esprit quand il sorti du restaurant. C’est l’effet ordinaire de la détente qui se produit toujours après une crise morale.

Il remonta en voiture, plein de confiance, et à huit heures moins quelques minutes, il débarqua sur le boulevard du Temple, devant le théâtre où allait se décider l’avenir de Violette… et le sien.

La façade du théâtre gouverné par l’audacieux Cochard brillait comme un soleil. Le gaz courait en festons lumineux sur les corniches et au-dessus de la porte principale apparaissait en lettres de feu le nom de la pièce de réouverture.

C’était le réveil éclatant des Fantaisies-Lyriques, fermées depuis six mois, et tout le quartier était sur pied pour contempler l’illumination.