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Page:Boisgobey - Rubis sur l'ongle, 1886.djvu/314

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« Mesdames et Messieurs, nous avons la douleur de vous annoncer que la direction se trouve dans l’impossibilité absolue de continuer la représentation. »

Il y eut des exclamations de désappointement, mais avant d’éclater en imprécations, la foule attendit une explication.

« Par un inqualifiable oubli de ses devoirs d’artiste et du respect qu’elle doit au public, Mlle Thabor…

— Oh ! oh !… quoi ?… qu’est-ce qu’il y a ? elle se trouve mal ! crièrent des voix.

— « Mademoiselle Thabor, déjà habillée et toute prête à entrer en scène, a brusquement quitté le théâtre, sans prévenir personne et malgré toutes les recherches qui ont été faites, il a été impossible de la retrouver. »

Le tonnerre tomant au beau milieu de la salle n’aurait pas produit plus de fracas et plus de désordre que cette malencontreuse annonce. La fin se perdit dans le bruit et peu de personnes entendirent que la direction proposait de rendre l’argent, à moins qu’on n’acceptât de laisser lire le rôle de la Fauvette par une chanteuse en disponibilité.

Les spectateurs se levèrent en masse et des projectiles variés commencèrent à pleuvoir du paradis sur l’infortuné régisseur, qui n’eut que le temps de fuir pendant que la toile tombait. Et en vérité, il y avait de quoi se fâcher, car on ne vit jamais à Paris une actrice disparaître pendant une représentation, surtout pendant une première. Ces choses-là n’arrivent que sur des théâtres forains, au fond des provinces les plus arriérées, et encore pas souvent.