Page:Boisgobey - Rubis sur l'ongle, 1886.djvu/326

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lui remit un billet qu’elle ouvrit en tremblant et qui ne contenait que ces lignes, écrites au crayon, comme le message reçu par Bécherel :

« Robert vient d’être victime d’un accident grave. J’ai pu le faire transporter dans une maison amie. Il veut absolument vous voir. Venez immédiatement. Ma voiture vous attend pour vous conduire près de lui. »

Le piège était grossier et pourtant la jeune fille s’y laissa prendre.

Elle ne douta pas que cet avis ne vînt de M. de Mornac. Elle ne se demanda pas de quel accident il s’agissait, ni comment le colonel avait pu se trouver là juste à point pour ramasser le blessé, ni chez quel ami il l’avait mené dans un quartier où ni lui ni Robert ne connaissaient personne. Elle ne pensa qu’à courir au secours de l’homme qu’elle aimait et, s’il devait mourir, à le revoir encore une fois avant qu’il expirât.

L’idée ne lui vint même pas de prévenir le directeur. À quoi bon du reste ? Il aurait essayé de la retenir et elle était résolue à se rendre à l’appel de M. de Mornac.

Elle savait le chemin de l’escalier ; elle s’y précipita et dans la rue, à quelques pas de l’entrée des artistes, elle trouva un domestique en livrée sombre qui lui dit, en ôtant son chapeau :

— La voiture est là, et si mademoiselle veut bien me suivre…

— Qu’est-il arrivé à M. de Bécherel ? interrompit Violette.

— Un grand malheur, mademoiselle. Il a été renversé et foulé aux pieds sur le boulevard par les