Aller au contenu

Page:Boisgobey - Rubis sur l'ongle, 1886.djvu/92

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

à quoi Robert se croyait obligé de répondre par un : merci, monsieur ! qui les étonnait beaucoup, parce qu’ils n’étaient point accoutumés à cette politesse inutile.

— Ils me prennent pour un spéculateur, c’est évident, pensait Bécherel. J’ai bien envie de m’en aller… Mais, non, je ne puis pas partir avant d’avoir revu Gustave, à moins que le Galimas ne vienne à passer par ici.

Il se résigna donc à rester et pour prendre patience ils se mit à écouter les mots qu’échangeaient les courtiers et dont il ne comprenait qu’à demi la signification.

— Que fait-on à la corbeille ?

— On baisse dur. Quatre-vingt-deux vingt-cinq.

— On a ouvert à quatre-vingt-trois. C’est raide.

— À propos de quoi cette dégringolade ?

— Mauvaises nouvelles du Tonkin.

— Est-ce officiel ?

— On n’a encore rien affiché. Mais le gros Gustave est toujours bien informé ; il a un ami du ministre dans sa manche. Et il pousse à la baisse comme un enragé. Il vient de vendre trois cent mille.

— Rien que ça pour commencer ! Il faut qu’il soit bien sûr de son fait. Il est trop malin pour s’enfiler, celui-là. Mais il doit y avoir quelqu’un derrière lui. S’il était seul, il n’aurait pas assez de crédit pour jouer si gros jeu.

Cela dura ainsi vingt minutes. Robert, ahuri, se demandait si son ami était devenu fou. L’idée lui vint de s’informer. Il avisa à quelques pas du coin où il se tenait un jeune homme dont la figure lui