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Page:Bonafon - Les Confidences d une jolie femme.djvu/133

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dre, comment oſez-vous renoncer… Finiſſez, me dit-elle, avec une eſpece de fureur ; je n’ai beſoin des conſeils de qui que ce ſoit, & vous ſeriez la derniere dont il me conviendroit d’en recevoir.

Quoique je n’euſſe pas mis une extrême chaleur dans mes remontrances, elles étoient ſi peu faites pour m’attirer cette bruſquerie, que j’en fus vivement offenſée. Sans le retour de la Marquiſe, ce commencement d’aigreur auroit pu nous mener loin. Notre tête-à-tête, notre émotion, parurent la ſurprendre, même la troubler. Elle n’eut rien de plus preſſé que de me demander la cauſe de ces nuages dès que nous eûmes quitté la grille. Je la lui racontai fort naïvement. De quoi vous mêliez-vous ? me dit-elle. Laiſſez Mademoiſelle d’Aulnai achever ſon ſacrifice, puiſqu’elle en a la fantaiſie… Mettant à part l’intérêt de la fortune, il en eſt mille autres qui doivent vous rendre cette folle démarche avantageuſe. Savez-vous bien que votre ſœur a dans le caractère, dans la tournure de ſon eſprit, tout ce qu’il faut pour faire votre malheur, ſi vous viviez enſemble dans le monde ?… Je dis plus, toutes converſations particulieres ſeroient capables de produire, en partie, ce triſfte effet. Ce n’eſt qu’en les évitant avec ſoin que vous conserverez votre repos,