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Page:Bonafon - Les Confidences d une jolie femme.djvu/75

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les vôtres. Et le Comte fait-il tous nos malheurs ? demandai-je : que fait-il ? quels ſont, à ſon égard, les traitements de ma mere ? — Ils ne ſe ſont pas vus depuis que vous êtes ici ; M. le Comte demeure actuellement aux Mouſquetaires. Quoi, dis-je, Madame de Rozane l’a forcé de quitter ſon pere ? — C’eſt ce dont je ne ſuis pas inſtruite ; mais il y a beaucoup d’apparence. Ah ! m’écriai-je, nous ſommes perdus ! nous ſommes ſéparés pour toujours… Nous en mourrons ! & mon inexorable mere s’en applaudira… Un torrent de larmes me coupa la parole ; Marcelle eſſaya en vain de me conſoler ; Mademoiſelle d’Aulnai, qui ſurvint, l’entreprit plus efficacement.

Flexible aux impreſſions du bien & du mal ; paſſant avec rapidité du découragement à la préſomption, je me laiſſai perſuader que je devois compter ſur une révolution favorable, ſi j’avois aſſez de courage pour me conſerver à ce que j’aimois, indépendamment de toute volonté contraire.

Par le conſeil de ma ſœur, je répondis à la lettre de la Supérieure, d’une maniere à accélérer notre réconciliation. Nous nous vîmes… J’admis ſes excuſes, pour la mieux diſpoſer à recevoir les miennes… La paſſion me rendit ſi touchante, ſi pathétique, & ſon langage eſt ſi puiſſant ſur une ame