Aller au contenu

Page:Bonafon - Les Confidences d une jolie femme vol2.djvu/121

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
( 30 )

chercher un lieu ſûr, où nous pourrions nous voir, ſans bleſſer les yeux de celui qu’il appelloit mon oppreſſeur.

Le deſſein me ſembla téméraire, non impraticable… Sans rien promettre, ſans rien refuſer, je me retranchai dans les objections… En attendant que je me décidaſſe, nous nous écrivions ſans ceſſe, & Rozane n’étoit pas traité favorablement dans cette correſpondance. J’appuyois, avec chagrin, ſur le peu de rapport qui ſe trouvoit dans nos caracteres… J’aſſurois que l’expérience avoit, pour mon malheur, déchiré le bandeau de l’amour… Je gémiſſois de n’être plus maîtreſſe de mon choix, pour le faire tomber ſur ce que j’aimois avec diſcernement.

Cette concluſion étoit fauſſe. Les difficultés avoient converti un goût de caprice, en un ſentiment aſſez vif, & je croyois n’avoir plus, pour Rozane, qu’un attachement d’eſtime ; mais je me connoiſſois en maris, & ne lui aurois préféré qui que ce fût à ce titre.

Cardonne ne tarda pas à m’indiquer une maiſon propre à nos entrevues. Il prioit, preſſoit… J’héſitois… J’étois retenue par la crainte des ſuites… Une crainte plus forte l’emporta ſur mes ſcrupules.

Le ſtyle de Cardonne changea ſubite-