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Page:Bonafon - Les Confidences d une jolie femme vol2.djvu/164

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ſpectacle qui lui faiſoit peur. Le Comte fut frappé de ce tableau, en reprenant ſes ſens, & n’en put ſoutenir l’impreſſion. Alors je me jettai à ſon cou, & mêlai mes pleurs à la ſueur froide dont ſon viſage étoit inondé. Rozane ! m’écriai-je, mon cher Rozane, daigne regarder une femme qui t’adore, & qui veut te dédommager tous les jours de ſa vie, des chagrins qu’elle a pu te cauſer. Mademoiſelle des Salles l’exhortoit à faire un effort. Rendez-vous, diſoit-elle, aux vœux de ceux qui vous aiment… Votre cœur ne doit plus s’ouvrir qu’à la joie, aux ſentiments délicieux de l’amour & de la nature.

Il fut long-temps ſans paroître entendre ce qu’on lui adreſſoit. Enfin, je ſentis un mouvement foible, mais marqué, par lequel il ſembloit vouloir me repouſſer.

Ses regards languiſſants ſe promenerent autour de lui ; … il les arrêta ſur l’enfant, qui l’examinoit d’un air d’étonnement & de curioſité. C’eſt donc là ma fille ? demanda-t-il à Mademoiſelle des Salles. Oui, répondis-je, en la lui préſentant ; c’eſt ta fille, ç’eſt la mienne, qui vient redemander pour ſa mere, la place qu’elle occupoit dans ton cœur… La petite ouvrit les bras pour lui faire de douces careſſes, conformément à nos inſtructions : il la prit dans les ſiens,