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Page:Bonafon - Les Confidences d une jolie femme vol2.djvu/28

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de l’embarras, dans la maniere dont vous y répondîtes… M’en croirez-vous ? Ces ménagements me déplurent ; votre procédé m’auroit paru plus eſtimable, ſi franchement inconſtante, vous aviez manifeſté un ſentiment, dont le prétexte, vrai ou faux, pouvoit être tiré de vos devoirs. Mais après avoir fait trophée de votre nouvel amour, vous être livrée à l’engouement des plaiſirs, avoir porté la froideur juſqu’à ne me pas donner une légère marque de ſouvenir ; après tout cela, dis-je, vouloir m’en impoſer par une petite diſſimulation, jouer l’indifférence pour Murville, la pitié pour moi ; n’oſer vous montrer ni femme ſenſible, ni maîtreſſe infidelle : c’étoit manquer à votre mari, à votre amant & à vous-même.

Je ne fus pas long-temps ſans reconnoître que vous étiez négligée par Murville, & que le dépit me ramenoit votre cœur ; mais vous l’avouerai-je ? La même fierté qui m’avoit empêché de vous faire entendre mes plaintes, m’empêcha auſſi de mettre à profit l’occaſion que vous me préſentiez. Une femme que j’aurois médiocrement aimée, ne m’auroit pas trouvé en garde contre cette tentation… Avec vous je dédaignois un ſemblable triomphe. La renaiſſance de votre goût pour moi n’étoit qu’une ſuite des négligences de Murville, ou de