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Page:Bonafon - Les Confidences d une jolie femme vol2.djvu/30

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don où vous m’avez laiſſé, paroiſſent inconcevables… Le peu d’application que j’ai donné à l’étude des femmes, le mal qu’on en dit, & ma propre expérience, m’auroient fait regarder vos variations comme un défaut de votre ſexe, ſi l’exemple de Mademoiſelle d’Aulnai n’avoit que trop prouvé ce dont il eſt capable, quand une grande paſſion l’anime.

Quelqu’amour que j’euſſe pour le Comte, mon reſſentiment s’allumoit d’autant plus, qu’il me reſtoit moins de reſſources pour me défendre… Mes devoirs m’en offroient encore une : je les alléguai avec hauteur ; je me parai de vertus dont je ne connoiſſois que le nom… Vous n’êtes pas franche, dit Rozane, & pourquoi ? Laiſſez penſer au public ce que vous voudriez me perſuader, ce ſera bien fait ; mais vouloir me tromper ! Comment en avez-vous pu former le deſſein ?… Madame, ſi vos devoirs avoient été la regle de votre façon d’agir avec moi, j’aurois reſpecté la ſévérité de vos principes, à quelque privation qu’ils m’euſſent condamné ; mais j’avois trop d’intérêt à vous obſerver pour m’y méprendre… Vous avez aimé Murville par foibleſſe, vous vous en êtes dégoûtée par légèreté, par mécontentement ; votre cœur eſt revenu vers moi par habitude, & peut-être les char-