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Page:Bonafon - Les Confidences d une jolie femme vol2.djvu/58

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j’avois acquis de l’expérience… J’oſai, dans ce moment, les tourner en certitude, & en faire la matiere d’une inſultante raillerie. Vous êtes un monſtre, me dit le Baron d’une voix terrible ; … ſortez, délivrez-moi de la préſence d’une femme perverſe, pour qui rien n’eſt ſacré… Il s’éloigna en me lançant un regard foudroyant ; me renouvella par un geſte de la main, l’ordre de ſortir : j’en fis un de pitié, & me retirai bien furieuſe, bien diſpoſée à la révolte.

J’avois dans mon caractere aſſez peu de reſſources pour la méchanceté. Quelque ardent que fût le deſir de contrarier mon mari, de mortifier l’Intendante, il ne me rendit pas plus ingénieuſe ſur les moyens… Une idée folle, dangereuſe, s’offrit à moi : j’en fus ſéduite.

Il étoit clair que le changement de Murville & mes chagrins étoient l’ouvrage de Madame d’Archenes. La jalouſie avoit donné naiſſance à ſon reſſentiment, peut-être que l’amour en prolongeoit la durée ; ce peut-être me parut bientôt une vraiſemblance, puis une démonſtration. Jugeant de ſes ſentiments par les miens, je me dis que puiſqu’elle avoit aimé Rozane, elle l’aimoit encore ; j’ajoutai que le plus rude tourment pour une femme vaine & paſſionnée, étoit de voir le triomphe de ſa rivale, qu’il ne