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Page:Bonafon - Les Confidences d une jolie femme vol2.djvu/81

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ce… Je pourrai me plaindre… Je pourrai mourir ; mais je ne montrerai jamais de foibleſſe indigne du cœur que je poſſede, de ce cœur adorable, donc le mien fait ſa gloire & ſa félicité. „

Cette Lettre me jetta dans un déſordre d’eſprit incroyable. Les dangers paſſés s’offrirent à moi comme préſents… Je voyois le fer levé ſur le ſein de mon amant, ſon ſang verſé, ſon tombeau s’ouvrir… Ma raiſon, ou peut-être, celle de Julie, eut bien de la peine à diſſiper les fantômes effrayants dont je m’étois environnée.

Enfin, j’entrevis les choſes avec plus de netteté, ſans en devenir plus tranquille. Murville étoit mort ; mais l’implacable d’Archenes exiſtoit pour le tourment de ma vie ; belle & peu ſcrupuleuſe ſur le prix des ſervices qu’elle exigeoit, combien d’ennemis ne pouvoit-elle pas nous ſuſciter ! nous marcherions ſans ceſſe entre des précipices ; nous ſerions obligés de porter partout la défiance & la circonſpection.

D’un autre côté, ma mere connoiſſoit l’audace de ma façon de penſer à ſon égard ; j’avois une preuve trop forte de ſa colere, pour me flatter qu’elle en adouciroit les éclats à mon retour : ce ſeroit beaucoup, ſi elle n’alloit pas juſqu’à me défendre ſa maiſon.