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Page:Bonaparte - Œuvres littéraires, tome 1, 1888.djvu/203

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milles, affamés, nus, sans éducation, sans délicatesse. Plus redoutables que des sauterelles, ils dévoraient les champs, vendaient la justice et emprisonnaient les plus riches pour obtenir une rançon. On riait à Gênes de ces plaisanteries nobiliaires ; le répertoire des gens aimables, des conteurs de bons mots dans les sociétés, n’est rempli que d’aventures de ces gentilshommes, et toujours le Corse est le battu et le moqué… Combien avez-vous gagné ? Nous avez-vous laissé quelque chose à prendre ? demandaient ceux qui allaient partir à ceux qui étaient de retour. Un honnête sénateur fort religieux avait coutume de dire une prière toutes les fois qu’il entendait la cloche des morts annoncer le décès de quelque patricien ; il demandait toutefois avant si le défunt avait été employé en Corse, et dans ce cas, il se dispensait de la prière, disant : À quoi cela servirait-il ? è a casa del Diavolo, il est au diable.

Les bénéfices ecclésiastiques furent donnés par les évêques ; les évêques furent nommés à la sollicitation des cardinaux génois. Il est sans exemple qu’un Corse ait été évêque, et les prêtres génois furent contents.

Et le négociant ! Comment son intérêt eût-il été oublié dans un État commerçant ?… Des lois positives lui accordèrent le monopole de l’approvisionnement et du trafic. L’on détruisit les marais salants qui existaient, l’on en fit autant des poteries et de toutes