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Page:Bonaparte - Œuvres littéraires, tome 1, 1888.djvu/362

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vilités d’usage ; à Eugène, à Hortense, amour vrai.


V

Albenga, le 18 germinal (7 avril 1796).

Je reçois une lettre que tu interromps pour aller, dis-tu, à la campagne ; et, après cela, tu te donnes le ton d’être jalouse de moi, qui suis ici accablé d’affaires et de fatigues. Ah ! ma bonne amie !… Il est vrai que j’ai tort. Dans les premiers temps, la campagne est belle ; et puis, l’amant de dix-neuf ans s’y trouvait sans doute. Le moyen de perdre un instant de plus à écrire à celui qui, éloigné de trois cents lieues de toi, ne vit, ne jouit, n’existe que pour ton souvenir, qui lit tes lettres comme on dévore, après six heures de chasse, les mets que l’on aime. Je ne suis pas content. Ta dernière lettre est froide comme l’amitié. Je n’y ai pas trouvé ce feu qui allume tes regards, ce que j’ai cru quelquefois y voir. Mais quelle est ma bizarrerie ! J’ai trouvé que tes lettres précédentes oppressaient trop mon âme ; la révolution qu’elles y produisaient attaquait mon repos, et asservissait mes sens. Je désirais des lettres plus froides, mais elles me donnent le glacé de la mort. La crainte de ne pas être aimé de Joséphine, l’idée de la voir inconstante, de la… Mais je me forge des peines. Il en est tant de