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Page:Bosquet - Une femme bien elevee.pdf/51

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mencent à tourner en défauts. Sa taille majestueuse était un peu lourde, ses épaules un peu larges, ses cheveux un peu ébouriffés, ses traits un peu masculins. Sa politesse empressée était un peu remuante ; sa voix avait des résonnances graves dont on eût aimé quelquefois à diminuer le volume. Au demeurant, madame Milbert, gaie, alerte, adroite, habile, n’avait qu’un défaut, et le plus grave reproche qu’on pût lui en faire était de l’avoir transmis à sa fille : elle s’attribuait une omnipotence universelle ; tout ce qui n’était point elle, pour elle, ou par elle était inutile ou dangereux.

La première fois que Félicien et sa femme parurent aux réunions de madame Milbert, ils firent événement et l’on ne s’occupa que d’eux : Comment leur voyage s’était-il passé ? le chemin de fer les avait-il fatigués ? avaient-ils pris beaucoup de voitures ? quelles villes avaient-ils visitées ? combien de temps y avaient-ils séjourné ? à quels hôtels logeaient-ils ? les prix étaient-ils les mêmes qu’à Paris ? etc. Les réponses ne faisaient point attendre les questions. Quand la curiosité fut épuisée, on récompensa la complaisance d’Adrienne, qui presque toujours avait porté la parole, en lui racontant la