Page:Bouasse - Capillarité - Phénomènes superficiels, 1924.djvu/9

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Votre système nous le connaissons. Lorsque Liard reconstitua les facultés (c’est une manière de parler), on décréta que les maîtres de conférences qui ne publieraient rien ne seraient pas renommés (leur nomination était annuelle). Je connais deux exemples de cette rigueur ; ils datent de trente-cinq ans. Ai-je besoin de vous apprendre qu’aujourd’hui vous pouvez, s’il vous plaît, dormir sur vos deux oreilles : non seulement personne n’y trouve rien à reprendre, mais vous êtes le chouchou d’une administration imbécile ?

Votre système est, dit-on, pratiqué en Amérique : outre-océan on paie pour « travailler » ; si vous ne rendez pas, on vous dégomme. Mais nous ne sommes pas en Amérique ; le mot efficiency n’est pas français.




Encore si l’on vous entretient dans un laboratoire pour l’avancement de la science, faut-il ne pas voler à l’État les heures qu’il paie.

Or nous savons ce qui arrive en pareil cas.

Jadis les professeurs du Collège de France étaient astreints à 40 leçons annuelles, ce qui n’est pas la mer à boire. Ils ont crié comme des bridés qu’une telle forcerie les détournait de leurs admirables travaux. Je ne sais quel fut le résultat d’aussi patriotiques remontrances ; mais je prie mon lecteur de s’enquérir des occupations de ces savants éminemment désintéressés, en dehors de leur présence au Collège de France, occupations officielles ou industrielles, s’entend.

Le scandale est tel que naguères une circulaire interdisait aux professeurs de faculté d’administrer une exploitation industrielle. Mais si l’État est tout à coup pris de scrupules, comment souffre-t-il les cumuls dont il me serait trop facile d’allonger le catalogue. Au surplus dire que la science doit aider l’industrie, ne signifie pas qu’un professeur, payé par l’État pour travailler dans son laboratoire, peut, sans voler le contribuable, administrer une mine, un chemin de fer, un office de brevets, une fabrique de produits chimiques.

Qu’on les paie davantage, dites-vous ; ils ne compléteront pas ailleurs leur matérielle ! Certes il y a matérielle et matérielle ; mais je crains que payés le double, ils ne trouvent pas davantage la matérielle suffisante pour ne faire que leur métier.

Un professeur me disait : « On ne peut vivre à moins de cinquante mille francs. » De fait il est professeur ici, professeur là, expert ailleurs, chargé de missions, que sais-je encore ! Il gagne largement les 50 000 balles. Voulez-vous qu’on le paie 50 000 francs pour s’occuper au laboratoire de la science qu’il professe ? Tel que je le connais, il trouverait bien moyen de cumuler autre chose !

Mais les règlements s’y opposeront ?

Vous êtes candide ! Nous payons des gens dans les facultés de médecine pour travailler à l’avancement de la science : dans leurs laboratoires ils