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Page:Boufflers - Journal inédit du second séjour au Sénégal 1786-1787.djvu/47

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Embrasse la bonne Auguste et ma chère d’Andlau de ma part et dis-leur que je les charge de t’aimer en attendant mon retour.


Du camp de Cagnac, ce 3 février. — Je suis parti mon enfant, je suis même arrivé à la couchée avec quatre chameaux, huit chevaux, un curé, cinq soldats, deux officiers et huit ou dix domestiques tant noirs que blancs. Malgré mon escorte, je suis un peu sur le qui-vive, parce que le village auprès duquel je campe est malintentionné et que mon petit camp est entouré de gens armés de fusils, d’arcs et de lances qui s’approchent indiscrètement, regardent curieusement et répondent insolemment ; et comme ils sont au moins cent contre un, il me faut une dose centuple de prudence. Je suis au moins bien aise que ce soir tu ne couches pas avec moi ; mais nous serons demain plus tranquilles et si tu veux venir à Wanoquiander, tu seras la bien reçue.


Ce 4. — Nous nous sommes tirés des mauvaises mains dans lesquelles nous étions et au lieu de suivre l’intérieur des terres, nous suivons le bord de la mer où le pays est découvert et où l’on ne peut point venir en force contre nous. J’ai des hospices établis le long du rivage ; ce sont des cases de paille élevées de six en six lieues, où nous déposons nos ballots, où nous couchons nos soldats et nos gens ; le curé, les officiers et moi nous couchons sous des tentes et nous faisons assez bonne chère. Mais la distance est grande et la marche est lente, et toute ma suite me gêne parce que tout ce que je traîne me retarde et par conséquent me tourmente. Car tu sais qu’en voyage j’ai des moments de folie, dont je