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Page:Braddon - Aurora Floyd, 1872, tome II.djvu/40

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AURORA FLOYD

qu’il plaît à M. Conyers de vous garder chez lui. Qui vous a envoyé ici ?

— Lui, — répondit Hargraves d’un ton bourru en indiquant avec un mouvement de la tête la maison de l’entraîneur.

— James Conyers ?

— Oui.

— Que veut-il ici, alors ?

— Il m’a dit de venir jusqu’au château pour voir si vous et le maître étiez de retour.

— Alors, vous pouvez partir et lui annoncer que nous sommes rentrés, — dit-elle d’un ton méprisant, — et que s’il avait attendu un peu plus longtemps, il n’aurait pas eu la peine d’envoyer ses espions près de moi.

L’idiot, sentant que ces paroles contenaient pour lui l’ordre de se retirer, gagna la porte à reculons, sans perdre du regard les fouets et les cravaches rangés au-dessus de la cheminée. Mme Mellish aurait pu avoir la fantaisie de lui cingler les épaules, s’il avait eu l’audace de l’offenser.

— Attendez, — dit-elle brusquement. — Puisque vous êtes ici, vous pouvez vous charger d’un message ou d’un mot d’écrit, — ajouta-t-elle avec un air de dédain, comme si elle ne pouvait se résoudre à donner le nom de lettre à une communication entre elle et Conyers. — Oui, vous pouvez porter quelques lignes à votre maître. Attendez pendant que je vais écrire.

Elle fit de la main un geste impérieux qui voulait dire clairement :

— N’approchez pas davantage : vous êtes trop ignoble pour qu’on vous souffre autrement qu’à distance.

Et elle s’assit à la table de John.

Elle griffonna deux lignes avec une plume d’oie sur un morceau de papier qu’elle plia sans donner à l’encre le temps de sécher. Elle chercha une enveloppe parmi les monceaux de papiers, livres, notes, reçus, imprimés et autres, épars sur la table de son mari, et en ayant trouvé une, non sans peine, elle y introduisit le papier plié, en humectant le côté gommé, et la tendit à Hargraves, qui