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Page:Braddon - L’Héritage de Charlotte, 1875, tome II.djvu/162

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L’HÉRITAGE DE CHARLOTTE

écraser en lançant sur eux des quartiers de roc ; ils formaient un cercle effrayant autour de lui, et de quelque côté qu’il se retournât, il voyait le même front d’ennemis invincibles comme la mort.

Qu’avait-il à craindre ?… La découverte du crime passé ?… Non, c’était une folle terreur qui l’avait troublé à la mention du nom de Halliday, une frayeur d’enfant. La découverte du crime présent était plus à craindre ; l’œuvre qu’il avait accomplie, selon sa croyance, était une œuvre dont la preuve ne pouvait pas être faite contre lui.

Mais il y a des crimes dont il suffit d’être accusé pour que cela équivaille à une condamnation. Les avocats peuvent plaider, le jury peut l’absoudre, mais l’opinion publique se prononce contre le misérable accusé, et son front est pour toujours marqué du stigmate de Caïn.

Sheldon n’envisagea point sa situation à un point de vue sentimental, mais il se dit qu’être soupçonné d’avoir empoisonné son ami et qu’être accusé d’avoir empoisonné ou tenté d’empoisonner sa belle-fille, c’était pour lui la ruine… une ruine sociale et commerciale… une ruine complète et irréparable.

Après avoir ainsi regardé en face l’ennemi armé qui se dressait devant lui, il passa à un autre ennemi caché.

Qu’arriverait-il si Charlotte se rétablissait et s’il échappait au soupçon publiquement révélé, car de l’opinion intime du docteur Jedd, il avait fort peu de souci. Qu’arriverait-il alors ?

Son terrible adversaire leva sa visière et il reconnut en lui la ruine commerciale.

Si dans quelques semaines il n’avait pas à sa dispo-