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Page:Braddon - L’Héritage de Charlotte, 1875, tome II.djvu/163

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L’HÉRITAGE DE CHARLOTTE

sition huit ou dix mille livres, sa perte comme membre du monde financier était inévitable.

La mort de Charlotte lui donnerait les moyens de se procurer cette somme sur les polices d’assurances souscrites par elle et dont, aux termes de son testament, il devait hériter : les compagnies d’assurances ne se presseraient probablement pas de liquider ses droits, mais il avait toutes les facilités possibles pour obtenir de l’argent sur de bonnes garanties, et il pouvait compter sur une forte somme en argent comptant, en cas de mort de Charlotte.

Mais, si elle ne mourait pas ? Si cette langueur sans nom, cette atrophie mystérieuse, combattues vigoureusement par le docteur Jedd, cédaient, et si la jeune fille devait vivre ? Qu’arriverait-il ?

Un spasme convulsif contracta le rude visage de l’homme d’argent au tableau qu’il se fit du résultat de sa déconfiture.

Il vit une foule affairée réunie dans la Bourse, il entendit le murmure de voix nombreuses, le bruit monotone des portes retombant après l’arrivée de nouveaux arrivants, et des pas pressés se succédant sans relâche. Tout à coup le murmure des voix, les bruits de pas s’arrêtèrent soudain comme sous le coup de la baguette d’un enchanteur. L’enchanteur n’était autre que le chef du Stock-Exchange qui prenait place au milieu de cette nombreuse assemblée et ôtait son chapeau. Après ce silence soudain, de nouveaux murmures de voix se firent entendre, puis un silence plus solennel encore s’établit. Trois fois le marteau de bois de l’huissier frappant sur la barre devant son siège fit entendre un bruit sinistre. C’est un arrêt qui va être prononcé contre quelqu’un. La Némésis commerciale cache son