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Page:Braddon - L’Héritage de Charlotte, 1875, tome II.djvu/220

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L’HÉRITAGE DE CHARLOTTE

visite accidentelle qui arrivait à la villa elle s’imaginait que c’était l’aigle fondant sur le colombier.

« Je ne puis m’ôter de l’esprit qu’il viendra et qu’il m’emmènera avec lui, dit-elle. Si la justice pouvait seulement faire quelque chose, de façon à ce que mon second mari ne puisse pas me forcer à vivre dans cette terrible maison où j’ai passé tant de jours et tant de nuits dans l’angoisse, que je suis convaincue que sa vue seule me rendrait malheureuse tout le reste de ma vie.

— Ma chère madame Sheldon, il ne viendra pas, dit Valentin.

— Si je pouvais seulement m’en aller bien loin et savoir que la mer ou quelque autre chose de ce genre est entre nous.

— Nous vous emmènerons de l’autre côté du canal, plus loin encore si cela vous plaît. Diana et M. Lenoble doivent se marier bientôt, et dès que Charlotte sera assez forte, nous nous rendrons en Normandie, dans leur château.

— Un château. En vérité ! s’écria Mme Sheldon avec un peu d’humeur. Dire que Diana, sans un denier, et avec un véritable vagabond pour père, épouse un homme qui a un château, tandis que ma pauvre Charlotte !… Je ne voudrais pas vous blesser, M. Haukehurst, mais réellement cela me paraît bien dur.

— Il est dur que Charlotte n’ait pas épousé un prince, toutes les grandeurs d’un prince des contes de fées n’eussent été que bien juste ce qui lui est dû, mais il se trouve heureusement, chère madame Sheldon, que votre douce et bonne fille a des goûts simples et ne soupire pas après les bijoux et les palais. Si elle devenait jamais riche…