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Page:Braddon - L’Héritage de Charlotte, 1875, tome II.djvu/281

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L’HÉRITAGE DE CHARLOTTE

étranglés. Quelques nègres de plus ou de moins, envoyés avant leur temps dans la sombre vallée, ne lui auraient pas paru un motif suffisant pour chercher querelle à un frère millionnaire et dans de généreuses dispositions.

Mais les circonstances de la mort de Halliday avaient fait voir le crime dans toute son horreur au spectateur de cet assassinat accompli de sang-froid, et avaient produit sur lui une impression qu’aucune autre circonstance n’aurait été capable de faire sur une nature aussi dure que la sienne.

George éprouvait quelque satisfaction à savoir que la fille de son ancien ami avait trouvé un heureux intérieur, et il se faisait un certain honneur de la part qu’il avait prise à la défaite de son frère.

Il rencontrait quelquefois Valentin dans ses pérégrinations dans le voisinage du British Museum, et l’accueil que se faisaient les deux hommes était suffisamment cordial ; mais Haukehurst n’invitait pas son ancien patron à venir à Charlottenbourg, et George pouvait comprendre que la visite d’un Sheldon dans cette maison ne serait pas reçue avec plaisir.

Il menait d’ailleurs une existence assez agréable, selon ses goûts ; il vivait chez lui, et trouvait dans la société de quelques amis choisis, de bons vivants en communauté d’idées avec lui qu’il rencontrait à une vieille taverne et au cercle, ce qui était pour lui le summum bonum en matière de relations sociales. Il se livrait à quelques spéculations sur le turf ; il escomptait les billets de bookmakers dans le besoin ; il leur achetait leurs mauvaises créances, ce qui le mettait en rapport avec les nobles patrons de ces humbles spéculateurs et lui ouvrait un nouveau terrain d’affaires.