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Page:Braddon - La Femme du docteur, 1870, tome II.djvu/162

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LA FEMME DU DOCTEUR.

qui jetaient habituellement de faibles taches jaunes crépusculaires en guise de lumière dans le parloir du médecin. Après qu’on lui eut apporté ces lumières, Isabel prit un livre placé sur un petit meuble près de la cheminée. C’était un livre de piété. N’essayait-elle pas d’être vertueuse, maintenant, et la vertu n’était-elle pas incompatible avec la lecture des poésies de Shelley le dimanche ? C’était un livre pieux fort abstrait, un volume des sermons de Tillotson, avec plus de logique rigoureuse et de primo, secundo, et tertio que la nature humaine n’en peut supporter. Isabel s’assit, le volume posé sur ses genoux, regardant vaguement les vieux caractères pâles, et revenant de loin en loin sur ses pas lorsqu’elle surprenait ses pensées à vagabonder loin du révérend Tillotson. Elle resta dans cette posture jusqu’à dix heures passées.

Mme Gilbert était seule dans cette partie basse de la maison, car les Jeffson étaient montés se coucher à huit heures et demie. Elle était seule, la pauvre créature naïve, ignorante et isolée, contemplant Tillotson et pensant à Roland, tout en s’efforçant, dans la mesure de ses forces, de ne pas dévier du droit chemin. Elle était assise de la sorte, lorsqu’elle fut surprise par un seul coup frappé doucement à la porte. Elle tressaillit sur sa chaise à ce bruit ; mais avec assez de hardiesse elle se dirigea vers la porte, en venant une bougie à la main, pour répondre à cet appel.

Il n’y avait rien d’étonnant à ce qu’on vînt frapper à une heure avancée à la porte du médecin, — c’était sans doute un malade nécessiteux qui avait besoin d’un médicament ; les malades nécessiteux venaient sans cesse demander des choses de cette nature. Mme Gil-