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Page:Braddon - La Femme du docteur, 1870, tome II.djvu/186

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LA FEMME DU DOCTEUR.

Il y avait près de quinze jours que George était malade, et le maître du Prieuré de Mordred était encore dans le Midland. Il ne savait rien de la maladie du médecin, car il n’avait pas l’habitude d’écouter les bavardages de son valet de chambre ; de plus ce fonctionnaire se trouvait moins que jamais porté en ce moment à donner à son maître des renseignements que celui-ci ne demandait pas, car, comme il le disait à l’office :

— Monsieur est d’une humeur massacrante depuis le jour de notre retour au château. Autant vaudrait adresser la parole à un tigre que de lui parler, excepté quand il vous fait une question, et Dieu sait que ça n’arrive pas souvent. Je ne me rappelle pas avoir jamais vu des manières aussi tristes que les siennes depuis quelque temps ; et si le salaire n’était pas convenable et les vêtements toujours propres et jamais râpés, — ce qui était le cas avec un certain membre de la Chambre des pairs, qui portait ses habits jusqu’à ce qu’ils ne fussent plus mettables, — il y a longtemps que je ne fatiguerais plus ce vieux et triste donjon de ma présence.

Roland n’aurait pu apprendre la maladie de George que par Gwendoline ; mais il n’était pas retourné à Lowlands. Il avait une idée vague qu’il irait, un beau matin, demander pour en finir la main de sa cousine ; mais il remettait indéfiniment la mise à exécution de cette idée, comme un homme qui pense au suicide peut différer la réalisation de son funèbre dessein, tout en tenant son pistolet chargé ou son acide prussique à portée de sa main, pour le moment où ils seront nécessaires. Il n’était pas repassé devant la maison du médecin depuis le jour où il avait vu Isabel