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Page:Braddon - La Femme du docteur, 1870, tome II.djvu/195

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LA FEMME DU DOCTEUR

elle vit un sourire tendre et mélancolique sur ses lèvres.

— Ma chère Isabel… ma chère madame Gilbert… si tout ce que je possède au monde pouvait vous donner le bonheur, je quitterais joyeux le Midland dès demain, sans emporter un sou. Je ne voudrais pas pour un empire que vous fussiez gênée pendant une heure, quand je possède plus d’argent que je n’en sais dépenser. Je vais vous donner immédiatement un chèque, ou plutôt une demi-douzaine de chèques en blanc que vous pourrez remplir au fur et à mesure de vos besoins.

Mais Isabel fit de la tête un signe de refus à cette proposition.

— Vous êtes bien bon, — dit-elle, — mais un chèque ne ferait pas mon affaire. C’est de l’argent qu’il me faut ; la personne pour laquelle je vous le demande n’accepterait pas un chèque.

Roland la regarda avec une soudaine expression de doute, — presque avec quelque chose qui ressemblait à de la terreur.

— La personne pour laquelle vous me le demandez, — répéta-t-il ; — ce n’est pas pour vous, alors, que vous désirez cet argent ?

— Oh ! non, vraiment… que pourrais-je faire de tant d’argent ?

— Je pensais que vous pouviez être gênée… je pensais que… Ah ! je devine : c’est pour votre mari que vous désirez cet argent.

— Oh ! non ; mon mari ne s’en doute pas. Mais, je vous en prie, ne me questionnez pas. Ah ! si vous saviez combien j’ai souffert avant de venir ici ce soir ! S’il y avait eu au monde quelque autre personne qui