Aller au contenu

Page:Braddon - La Femme du docteur, 1870, tome II.djvu/255

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
251
LA FEMME DU DOCTEUR

voir M. Lansdell aussi souvent qu’il vous plaira et courir le soir après des étrangers. Mais vous auriez pu attendre un peu, Mme Gilbert, vous n’auriez pas attendu longtemps… car ils ont dit que mon pauvre maître, que j’ai vu naître et que j’ai tendrement aimé à défaut des autres… j’ai entendu le médecin de Wareham dire à M. Pawlkatt qu’il ne passerait pas la nuit. Ainsi vous auriez pu attendre, Mme Gilbert, mais vous êtes une mauvaise femme et une mauvaise épouse !

À ces mots, le malade sortit brusquement de son sommeil et se mit sur son séant. Jeffson le saisit dans ses bras aussitôt, soutenant ce corps amaigri, qui, il n’y avait pas longtemps encore, était si robuste.

George avait entendu les dernières paroles de Mathilda, car il les répétait d’une voix sourde et singulière, mais néanmoins avec une clarté suffisante. Ceux qui l’avaient soigné furent étonnés de l’entendre parler si raisonnablement, car il y avait déjà longtemps qu’il avait perdu conscience des événements.

— Une mauvaise femme !… non !… non !… — dit-il. — Toujours une épouse tendre et soumise… toujours une femme vertueuse… Viens, Izzie, viens ici… Je crains que tu n’aies trouvé ta vie bien triste, mon amie, — dit-il très-doucement, comme elle approchait et qu’elle lui prenait les mains en le regardant avec un visage blême et bouleversé, — une vie triste… très-triste ; mais cela aurait changé. Je me proposais… plus tard… de changer de clientèle… d’aller à Hemswell… ville commerçante… sept mille habitants… et de te donner… une voiture… comme Laura Pawlkatt… mais… la volonté de Dieu soit faite, mon amie… J’espère que j’ai fait mon devoir… les pauvres gens… de meilleurs loge-