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Page:Braddon - La Femme du docteur, 1870, tome II.djvu/278

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LA FEMME DU DOCTEUR.

chose de vague et d’indécis, que je ne saurais dépeindre par mes paroles… quelque chose se révèle brusquement à mes regards. Il vous est arrivé, n’est-ce pas, d’être sortie à cheval un jour d’orage ? et vous avez pu voir le ciel triste et bas peser de toutes parts sur l’horizon, en masses lourdes et impénétrables ; puis tout à coup il s’est produit une petite ouverture dans la sombre barrière, et, à travers, vous avez aperçu bien loin le ciel bleu, planant à une distance énorme au dessus de ce rideau de plomb, et semblant être l’extrême limite de l’univers. Je suis resté longtemps sous ces cieux orageux, mon amie ; mais je crois que maintenant l’ouverture se produit dans la voûte obscure, et je puis entrevoir la splendeur qui commence au delà. Il ne me semble pas que je vais mourir. Je ne crois pas que le changement qui est si près de moi soit l’espèce de mort à laquelle j’ai cru. Ce n’est pas la fin, Gwendoline. La lumière qui s’est faite en moi est assez forte pour me montrer au moins cela. Ce n’est pas la fin.

Une fois, en s’éveillant d’un court assoupissement, il trouva sa cousine veillant à ses côtés. La garde dormait, et il commença à parler d’Isabel.

— Je désire que vous sachiez tout ce qu’il en est, — dit-il, — car vous n’avez entendu que la médisance et les cancans vulgaires. Je désire que vous sachiez la vérité. Cette petite histoire est très-folle… coupable peut-être ; mais ces bavardages de province ont pu la défigurer au point de la rendre méconnaissable. Je vais vous dire la vérité, Gwendoline ; car je désire que vous soyez une amie pour Isabel lorsque je ne serai plus là.

Alors il lui fit l’histoire de ses entrevues sous le