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Page:Braddon - La Femme du docteur, 1870, tome II.djvu/308

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LA FEMME DU DOCTEUR.

Raymond continua à expliquer la nature du testament, qui le nommait exécuteur testamentaire, ainsi que M. Meredith (le solicitor de Londres), ainsi que beaucoup d’autres choses qui n’avaient aucun sens pour celle qui les entendait perdue dans sa tristesse indifférente. Autrefois Mme Gilbert aurait été heureuse d’être riche et aurait imaginé immédiatement une existence de velours rubis et de diamants ; mais ce temps n’était plus. Les biens après lesquels nous aspirons nous arrivent souvent trop tard ; nous sommes comme ce poète qui apprit sur son lit de mort qu’on lui accordait enfin une pension.

Le Prieuré de Mordred devint donc la propriété d’Isabel, et pendant un temps toute la région shakespearienne du Midland eut ample matière à discussion dans le testament de Lansdell. Mais la voix de la médisance elle-même fut étouffée lorsque Mme Gilbert quitta l’Angleterre en compagnie de lord Ruysdale et de sa fille pour un long séjour sur le continent. Je cite en ce moment la Gazette de Wareham qui trouvait les faits et gestes d’Isabel dignes d’être rapportés, depuis qu’elle avait hérité des biens de Lansdell.

Gwendoline avait promis d’être l’amie d’Isabel : et elle tint parole. Il n’y avait plus d’amertume dans son cœur ; et peut-être son affection pour la veuve de Gilbert n’en était-elle que plus grande en raison de cet amour inutile et fou qui établissait entre elles une sorte de lien.

La fille de lord Ruysdale n’était pas femme à ressentir une basse envie de la fortune de Mme Gilbert. Le comte avait eu beaucoup de peine à se rendre compte du motif qui avait dicté le testament de son parent ; mais comme lui et sa fille reçurent chacun un